Les années difficiles.....l'occupation (suite)...
Et nous avons bien été obligés de reprendre cette vie impensable avec en plus la certitude pour mes parents de ne jamais revoir ce fils si brillant et si gai, toujours en mouvement et prompt à rendre service à qui en avait besoin. Quant à moi, il me semblait tout bonnement impossible de ne plus compter avec ce grand frère avec lequel j'étais si liée et que j'admirais, oh combien !
Mais voilà, sans jamais rien oublier, nous avons continué à vivre, si l'on peut dire ! de cette drôle de vie que l'occupant nous imposait, cette vie de peurs, de peines, de pleurs. Je crois que lorsqu'on est pris dans une telle tourmente, le seul objectif est "survivre" tant bien que mal ! Nous manquions de tout comme tout le monde ou presque, mais que faire ? Essayer simplement de saper le moral de l'occupant ce que faisaient la Résistance par de grands actes, et ce que nous faisions par des actes à notre portée, journellement. A cette époque, les allemands étaient furieux de voir que les françaises étaient restées coquettes ! mais c'était une réaction, il fallait faire comprendre que les français n'étaient pas si stoïques...Un petit exemple : j'ai dit que ma mère était lorraine et qu'elle allait tous les jours écouter la radio anglaise chez des voisins...Sa résistance à elle, c'était de revenir après l'heure du couvre-feu !!!ça m'inquiétait beaucoup...mais elle disait qu'elle n'avait pas à leur obéir ! ça semble peut-être ridicule à certains, mais c'est un exemple parmi tant d'autres. La résistance à coups d'épingles, ça arrive à déstabiliser et à être énervant.
1943 et début 1944, nous commencions à reprendre espoir; l'armée allemande avait de sérieux soucis sur le front Russe et un peu partout. Et nous le faisait supporter ! Nos jeunes partaient pour le service du travail obligatoire ce fameux STO qui a vu cette déportation massive....Déportées aussi les familles juives...les résistants également. Je me souviens de Jean Legourd, cet ami d'André, scout comme lui, mort à Buchenwald.... Chaque famille française était dans la peine. Les jeunes qui le pouvaient rejoignaient le maquis ou se cachaient avec des cartes d'identité faites en série et peut-être pas tout à fait légalement ! ça, j'en ai fait pas mal avec des collègues et sous la bénédiction du commissaire de Police d'Athis, mon patron depuis fin 1943 !
Nous espérions un débarquement allié, ce qui a eu lieu le 6 juin 1944. Mais avant cette date
de gros bombardements ont eu lieu sur Paris et la région parisienne. Le 18 avril 1944, la gare de triage de Juvisy/Athis a été bombardée....(site web "dandylan.over-blog.com") Cette nuit du 18 avril, je ne l'oublierai jamais. Y-at-il un seul jour sans que j'y pense ? je ne crois pas. Nous avons subi ce bombardement pendant une heure et en sortant de l'abri, plus rien qu'un spectacle de désolation....Nous n'avions plus de maison, plus de souvenirs, rien....Combien avons-nous été dans ce cas ? Des morts par centaines, des sinistrés.... Pour ma mère, c'est ce que j'ai appelé le coup de grâce .
S'il y avait un prix à payer pour obtenir notre libération et voir partir l'envahisseur, nous l'avons amplement payé, mais ça semblait quand même bon d'être vivants !
Quelle a été notre jeunesse ? Il y aurait beaucoup à dire et à écrire.... Je regrette de ne pas être écrivain ou historienne ! je pourrais développer ce sujet pendant des jours et des jours et il ne serait jamais épuisé....
Puis vint la Libération......